“Écologie” je hurle ton nom
Ils étaient 5 petits enfants blancs assis devant leur bol de chocolat un matin de fin de vacances … il n’y avait toujours pas de gouvernement, mais à la radio on annonçait déjà le gros coup de barre à droite, droite extrême droite … ils étaient 5 petits enfants blancs qui mangeaient des tartines de beurre salé et de confiture avant de partir à la plage et au club de voile … ils étaient choyés et hors de besoins matériels. Avaient ils perçu dans mes yeux une inquiétude ? Entre deux bouchées, ils ont tenté de donner du sens à ce revirement politique … pour finir par lâché un collégial et définitif : “c’est parce qu’il y a trop de racistes en France.” Et ils sont partis dans un désordre de sable et pulls humides d’eau de mer, en me laissant seule avec mes interrogations.
Est ce que pour être écolo, prendre en compte les alertes et les explications des scientifiques, être sensible au monde … la condition sinequanone est d’avoir le cul entre deux continents ? une habilité à voir l’autre et se voir comme l’autre ? un cosmopolitisme à tous crins ? … Si tous ceux qui avaient vécu ailleurs étaient des Bruno Latour, Claire Denis ou Claire Nouvian … le monde ne serait il pas différent. L’écologie, l’adaptation aux principes de la biophysiques et les histoires croisées des peuples … n’est ce pas aussi une histoire de terroirs ? d’indépendance ? d’autonomie stratégique ?
Avant la Bretagne, nous avions voyagé quelques jours dans le Pays Basque en Espagne : deux régions, deux drapeaux, deux langues, deux cultures et … autant de clichés, fantasmes et stéréotypes. L’une et l’autre de ces régions entretiennent un sentiment d’appartenance et une identité forte. Et pourtant dans l’une et l’autre de ces régions, la liberté semble ne pas le même goût, la même tessiture. Là bas, les visiteurs sont invités à passer dans le paysage des habitants : les nuages chargés d’eaux, les montagnes qui s’élèvent en vagues successives, les renards curieux la nuit, les églises de la reconquête au cœur d’or, la vipère qui se faufile entre les fougères, le fronton au cœur des jeux des enfants du village, les croquettas dans la nuit qui se fait douce, les grelots aux chevilles de ceux qui vont à la fête. Sur les panneaux de circulation seules les inscriptions en basque sont épargnées. Les murs sont en guerre permanente pour défendre un idéal de communs : la culture, la dignité, l’eau, l’air, la terre. Il y a aussi cet ermitage, plein de la lumière noire d’une puissance spirituelle qui s’éteint, les Basques cherchent et expérimentent l’innovation sociale, les communs.
L‘identité, ce qui nous rassemble dans un commun héritage et avenir, se lit dans les attachements que notre culture, notre société, nos habitudes nous font nouer, entretenir, développer. Attachements à des postures, à des puissances … ou attachements à notre environnement, aux dynamiques supérieures à nos conditions individuelles, qui nous permettent de continuer à être humains. Notre paysages, nos visages, nos identités sont, soit un gisement de valeurs à exploiter, soit une énergie qui nous anime pour être notre monde et être notre monde.Quand au siècle dernier, une nation aveuglée par le concept contre nature de “race” a occupé et spolié notre pays, un héro a écrit le nom de #Liberté dans un poème. Quand aujourd’hui, la légitimation du #racisme permet de mieux continuer à extraire, exploiter, asphyxier les dynamiques biophysiques de notre monde, #Écologie je hurle ton nom.
Hurler “écologie” pour qu’enfin notre nation, notre culture s’inscrivent dans une continuité d’interdépendances et attachements à ses paysages et visages … Hurler et enfin lâcher prise pour que grandisse la confiance que l’on accorde aux autres humains, aux autres vivants. Hurler de joie, car l’écologie c’est aussi une très bonne nouvelle, une belle aventure : l’insouciance d’un monde apaisé, plus serein, plus concret.
Écologie je hurle ton nom.